Amélie Samson

Dédale 2.0

Souvent, on associe le Web à un labyrinthe, à un rhizome ou un réseau, une structure mouvante sans entrée ni sortie, où chaque chemin est potentiellement le bon. Pour éviter de perdre du temps et de s’y perdre, des “intelligences” artificielles créent des profils personnalisés alimentés aux données d’analyse de nos comportements. Une étymologie possible de labyrinthe est « labirion », galerie creusée. Comment ne pas penser au Mythe du Minotaure ? Ce labyrinthe, construit sur mesure par Dédale, n’est pas seulement le Palais du Monstre, ou sa prison : c’est aussi sa tombe, c’est là qu’il meurt assassiné par Thésée. Les algorithmes contrôlent les chemins potentiels, ils définissent mathématiquement les murs de nos labyrinthes, dans lesquels nos traces s’accumulent et où on creuse à notre image le sanctuaire de notre mort numérique, le paysage de notre vie numérique.

Dédale est un projet de recherche qui propose de visualiser les gouffres numériques que nous creusons chaque fois que nous repassons sur la même page web. Une première série est réalisée à l’encre de Chine avec la technique traditionnelle du lavis grâce à un protocole où la main obéit à algorithme définissant les coordonnées à suivre. Si dans un même jour sont comptabilisés 31 passages sur la page Google.com, sont donc superposées 31 couches, ou 31 strates d’encre pour creuser le profil. La deuxième série est, elle, directement dessinée par un algorithme. Selon le même principe, elle propose une visualisation du nombre de passages sur la page Google.com chaque jour. Les visuels sont alors réunis dans une édition par mois. Au total, le mois de mai 2022 réuni 463 passages sur la page Google.