Dans « Rapport minoritaire », Philip Dick illustre un système futuriste mis en place pour condamner, par prémonition, les meurtriers avant qu’ils ne le deviennent. Partant de cette nouvelle, ce projet s’intéresse au système de sécurité avancé qui, par le biais de la technologie, soulève des problèmes d’éthique et de morale.
Depuis toujours en Chine, la question du bon ou du mauvais citoyen est ancrée dans les valeurs sociales. Mais de nos jours, grâce à la technologie et la reconnaissance faciale en particulier, le gouvernement Chinois a mis en place un système de surveillance et d’attribution de notes sociales. Cette note visible par tous permet de savoir si un individu est digne de confiance. Ainsi, elle donne accès à des privilèges attribués en fonction de la qualité de la note du citoyen.
L’échelle de notation varie en fonction des villes, et se situe en général entre 0 et 1500.
Très nombreux sont les privilèges octroyés par une note élevée. L’exemple pris ici est la ville de Pékin, où l’une des mesures prises par ce système est de rendre accessible les parcs publics seulement aux citoyens ayant une note supérieure à un certain seuil.
Dans un premier temps, ces données sont mises en forme dans l’idée de les organiser à la manière du système de crédit social. Celui-ci cherche à organiser la population selon une échelle sociale. Les données sont disposées d’une façon linéaire mais aussi d’une manière plus organique contrastant avec un ordre mécanique et répétitif.
Bary exagère donc les traits de ce système afin d’y créer une faille. L’échelle de notation est matérialisée par la création d’une barrière entourant un parc, composée de tiges en bambou. Dans la fiction du projet, les scores sont matérialisés par la hauteur des barreaux. Ainsi les scores les plus bas permettent un enjambement de la barrière inversant les conséquences du système sur les individus.
Le bambou, matériau traditionnel, en plus d’offrir des qualités techniques, apporte un sens au projet de par sa nature organique. Les diamètres des bambous sont variables et donc non maîtrisables, ce qui a conduit à l’élaboration d’une pièce adaptative permettant le maintien de diamètres variés. Celle-ci est produite par impression 3D.
Cette barrière se présente sous forme de modules qui s’assemblent à la manière des briques de la muraille de chine, formalisant ainsi les valeurs traditionnelles chinoises.
Le dessin du module est issu de la nécessité de pouvoir imbriquer dans plusieurs directions, à savoir trois. Ceci permet de suivre les contours d’un parc ou d’une zone que l’on veut clore.
Le processus de fabrication de Bary est le reflet de la relation qui existe entre tradition et numérique dans le Système de Crédit Social. Ainsi, chaque élément du projet, de par sa fabrication aussi bien artisanale que numérique, représente ce parallèle. La pièce en béton est coulée grâce à un moule produit numériquement, mais a besoin de l’intervention du geste de la main pour exister.